6 décembre 2022 – Par le comité de travail sur les traitements forcés. Ce dernier est notamment composé de personnes subissant ou ayant subi un traitement forcé, de chercheurs universitaires, de l’Association des groupes d’intervention en défense des droits en santé mentale du Québec, du Regroupement des ressources alternatives en santé mentale du Québec et d’Action autonomie. –
Radio-Canada présentait, le 28 novembre dernier, un malheureux reportage portant sur l’engorgement dans les urgences psychiatriques et faisant l’apologie des autorisations judiciaires de soins (traitements forcés). Dans la foulée de ce reportage, la présidente de l’Association des médecins psychiatres du Québec, la Dre Claire Gamache, affirmait en entrevue à l’émission Tout un matin l’importance d’imposer davantage de traitement à des usagers parce que la « maladie mentale » enlèverait la liberté. Son traitement, plus souvent qu’autrement une médication, redonnerait une certaine liberté.
Pourtant, nous sommes en contact avec des dizaines, voire des centaines, de Québécois et Québécoises qui ont vécu ces ordonnances de traitement partout dans la province. La plupart d’entre eux nous rapportent que les traitements, particulièrement lorsqu’ils sont forcés, peuvent au contraire, les enfermer dans une « prison chimique » très souffrante.
Les effets de la médication psychiatrique varient d’une personne à l’autre, et peuvent s’avérer pour certaines, extrêmement puissants. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle elle est utilisée comme contention chimique pour maîtriser les personnes en psychiatrie. C’est aussi une des raisons pour laquelle certains la refusent. Ils déplorent un manque d’information généralisé sur leurs effets (par ex. les effets secondaires, les interactions et les effets de sevrage) et leurs alternatives. Néanmoins, ces dernières existent : nommons par exemple la psychothérapie et les groupes d’entraide, comme les groupes d’entendeurs de voix. Ils dénoncent un dosage trop fort qui les vide de leur énergie, qui éteint leur personnalité et qui les zombifie. Ils décrient une pression indue, soutenue et intense à accepter les traitements, sans obtenir de réponses à leurs questions et ce, sans être écoutés à propos des effets qu’ils vivent. Soulignons également que certaines personnes refusent tout simplement parce qu’ils ne veulent pas prendre une médication qui aura un effet direct sur leur cerveau et sur leur corps.
Toutes ces raisons sont légitimes.
Nous avons le droit, en tant qu’usagers, d’accepter ou de refuser des soins. C’est notre droit le plus strict. Nul ne nous forcera à acquiescer à une chimiothérapie, par exemple. Le médecin traitant est tenu de présenter clairement à l’usager les conséquences et les risques du non-traitement, mais aussi ceux du traitement.
Personne ne voudrait se voir contraint à recevoir un traitement par le système de santé, et ce, même s’il nous dit que c’est pour notre bien. Personne ne voudrait non plus se faire imposer un traitement sans en connaître pleinement les effets à court et à long terme, tant bénéfiques que nuisibles. Ce droit est trop souvent ignoré en psychiatrie. Les effets secondaires de la médication sont tenus sous silence. Les alternatives doivent être présentées et valorisées. Les droits des patients sont bafoués. Et dans la quasi-totalité des cas, la cour donne le feu vert aux psychiatres. L’expérience terrain et la recherche démontrent une augmentation de plus en plus importante des traitements imposés. Le discours de l’Association des médecins psychiatres du Québec qui souhaite faciliter ce recours n’est guère de nature à nous rassurer.
Le fait de recevoir un diagnostic psychiatrique ne nous enlève pas notre droit à consentir. Ce droit ne constitue pas un obstacle au travail des psychiatres. Nous vivons dans un État de droit. Respectez la liberté de choix des citoyens qui utilisent les services. Offrez-leur une information complète et des alternatives à la médication.